Lors de la continuité pédagogique, les établissements se sont adaptés pour proposer à leur public des portes ouvertes virtuelles. Cette expérimentation menée dans le cadre des TraAM EMI 2021-2022 et à destination des étudiants en BTS Tourisme, vise à repenser la visite virtuelle du lycée, en partant de leurs pratiques numériques et dans l’optique de développer des compétences numériques et professionnelles.

Cet article se propose de poser un cadre réflexif avec le recensement des constats, points de départ du scénario ; pour permettre sa contextualisation avec l’apport de définitions, l’explicitation du processus d’apprentissage mis en œuvre et ses caractéristiques. Le cadre pédagogique présente ensuite une vue d’ensemble du scénario, dont les différentes étapes sont décrites dans le guide associé. Enfin, les dernières parties ont pour objectif d’inscrire le processus créatif dans ses apports avec la recherche, avant d’énoncer un bilan du projet et ses perspectives.

1. Constats de départ

Vecteur créé par Stoyset. Freepik.com

  • Les métiers du tourisme sont fortement concernés par le développement de nouveaux outils et supports liés au numérique. Ces évolutions nécessitent des compétences pour le titulaire du BTS Tourisme en matière de conception, de réalisation et de diffusion de l’information ainsi qu’à des formes nouvelles d’organisation du travail.
  • Comment permettre aux étudiants d’appréhender l’environnement numérique d’une future organisation touristique ? La construction de situations professionnelles proches du réel est essentielle pour permettre la réalisation de travaux visant un développement de compétences et la mobilisation de plusieurs ressources.
  • Dans la plupart des référentiels de compétences du 21e siècle, la créativité figure au rang des compétences incontournables, aux côtés de la communication, de l’esprit critique, de la coopération. Le 21e siècle attend des professionnels capables de produire et d’implémenter de nouvelles idées, de résoudre des problèmes complexes de manière originale.
  • Aujourd’hui, la créativité s’invite dans l’enseignement supérieur, au sein des référentiels, des  programmes ou dans les acquis d’apprentissage d’unités d’enseignement, à travers des méthodes pédagogiques innovantes.
  • Les médias numériques ouvrent de nouvelles possibilités pour la narration d’histoires. Dans une combinaison vivante d’images à 360°, de cartes, de fils d’actualités interactifs, l’utilisateur peut s’immerger dans l’histoire racontée de façon visuelle.

 

2. Contextualisation du projet

La démarche pédagogique s’inscrit dans une approche par le codesign . Il s’agit d’encourager la créativité des étudiants en proposant un cadre propice à l’expression et au développement de pratiques numériques innovantes. Ce projet permet aussi de réfléchir à l’intégration des outils numériques au service du processus créatif, tout autant que celui de la réalisation concrète.

Vers une définition de la créativité et du design thinking

La créativité est une aptitude humaine à se plonger dans un espace inconnu pour mettre en œuvre un raisonnement permettant de créer quelque chose de nouveau. Chaque individu dispose de capacités créatives plus ou moins développées. Il n’existe pas, comme on semble parfois le suggérer, d’individus non créatifs. Chacun peut à un moment ou à un autre apporter ses connaissances, mettre en œuvre des savoir-faire ou développer des savoir-être utiles au processus créatif collectif. Ainsi, dans le cadre privé ou professionnel, nous sommes tous en capacité de mobiliser des compétences permettant d’agir de manière créative et innovante.  […] l’animation d’ateliers de créativité permet de faire émerger des idées nouvelles tout en identifiant les connaissances à mobiliser ou à construire pour développer un projet innovant (Caron-Fasan, M-L. Bardot, V. (2018, 21 janvier). Comment évaluer les compétences créatives ? The Conversation. https://theconversation.com/comment-evaluer-les-competences-creatives-89732)

Le design thinking (littéralement « penser le design ») désigne l’ensemble des méthodes et des outils qui aident, face à un problème ou un projet d’innovation, à appliquer la même démarche que celle qu’aurait un designer. Tim Brown, fondateur de l’agence IDEO, propose l’une des définitions du design thinking les plus répandues aujourd’hui : « une discipline qui utilise la sensibilité, les outils et les méthodes des designers pour permettre à des équipes multidisciplinaires d’innover en mettant en correspondance attentes des utilisateurs, faisabilité et viabilité économique. »

Les principes fondamentaux du design thinking

Il s’agit d’une  approche et d’une méthode qui a pour objectif de résoudre un problème ou d’innover, en ayant une bonne compréhension des usages et mode de pensée de l’humain. Quel que soit le domaine d’application, les ingrédient clefs sont : l’empathie, la créativité, la cocréation, l’itération (prototyper, tester et apprendre) et le droit à l’erreur. Ils constituent le socle de cette méthodologie d’innovation centrée sur l’humain.

La philosophie du design thinking repose sur cinq préceptes :

  • l’empathie : compréhension et écoute des besoins et motivations des personnes ou utilisateurs du service,
  • l’attitude ou l’état d’esprit du futur designer : absence de préjugés, être curieux et acteur du changement,
  • le travail d’équipe et le collectif : à plusieurs, nous sommes plus forts pour résoudre un problème,
  • l’interdisciplinarité : la variété des profils facilitent la réflexion. Les différences de points de vue nourrissent et stimulent la créativité.
  • l’expérimentation : le design thinking offre l’opportunité d’apprendre de ses erreurs, de rebondir et de proposer de nouvelles idées.

Les différentes étapes du design thinking

Dans la littérature et au cours de l’histoire, nous trouvons plusieurs versions du processus de design thinking, comportant trois à sept phases distinctes. Cependant, toutes ces méthodologies incarnent les mêmes principes révélés pour la première fois par Herbert Simon, chercheur en sciences cognitives et Prix Nobel d’économie en 1978, est sans doute à l’origine du concept.

Dans son ouvrage, Tim Brown identifie trois phases principales qui se chevauchent entre elles, et qui ne doivent donc pas être vues simplement comme des étapes successives : « Une phase d’inspiration, dans laquelle on rassemble des informations issues de toutes les sources possibles ; puis l’idéation, où ces données sont traduites en idées ; enfin la réalisation, autrement dit la concrétisation des idées les plus porteuses en plans d’actions rigoureusement définis. » (T. Brown. Change by Design. How design thinking transforms organizations and inspires innovation. Harper Business, 2009).

Le processus de design pour Tim Brown

Nous retiendrons ici les étapes présentées dans l’ouvrage Le kit du design thinking. Comment utiliser les méthodes d’innovation les plus connues et les plus efficaces : 

  • Comprendre : phase visant à se familiariser avec le problème. “Pour donner corps au défi de design, on formule une question appelée aussi énoncé du problème“.
  • Observer : le problème défini vient ensuite la phase d’observation au cours de laquelle on cherche à comprendre et à en apprendre le plus possible sur l’utilisateur potentiel, ses besoins.
  • Définir un point de vue : l’énoncé du problème s’affine et permet à l’équipe d’en faire une synthèse et de partager une idée commune. Il constitue le point de départ à la recherche de solutions.
  • Trouver des idées ou idéation : le point de départ vers la découverte de solutions. Plusieurs outils permettent de générer un maximum d’idées comme le brainstorming ; idées qui seront ensuite triées et groupées.
  • Prototyper : la construction de prototype rend tangibles et perceptibles les idées retenues. Cette phase est étroitement liée à l’étape “Tester”. Le retour d’information consécutif aux essais permet d’améliorer ou d’écarter le prototype actuel.
  • Tester : l’utilisateur potentiel teste le prototype. Cette phase affine la vison du problème et celle de l’utilisateur. Elle renvoie aux étapes “Comprendre et Observer” et suscite un nouveau point de vue. Cette étape caractérise le processus itératif du design thinking.
  • Réfléchir : réflexion globale sur la méthode d’apprentissage, le travail d’équipe, le contenu du prototype final avec pour perspectives de documenter le projet et son développement continu.

 

3. Cadre pédagogique

Objectifs généraux :

  • Développer des compétences numériques créatives,
  • Impulser des dynamiques de coopération dans la cadre de la formation et des apprentissages,
  • Valoriser le collectif,
  • Initier les étudiants aux démarches créatives et développer des compétences en créativité.

Objectifs spécifiques : 

  • Développer des compétences comportementales (soft skills) et numériques dans le cadre de la formation et à partir d’une démarche de projet,
  • Réaliser une production « nouvelle » adaptée au contexte et aux publics,
  • Mobiliser des ressources internes et externes pour résoudre un problème,
  • Réaliser une tâche complexe dans un contexte d’apprentissage, technologique, informationnel et relationnel donné,
  • Résoudre un problème par l’intelligence collective,
  • Objectif de résultat avec une production finale,
  • Former de futurs professionnels créatifs,
  • S’investir dans une démarche de gestion de projet,
  • Travailler en équipe.

Domaines et compétences numériques du CRCN travaillées et évaluées : tableau à consulter ici.

Textes de références : 

Modalité : démarche de projet

Production attendue : création mobile immersive à l’occasion des portes ouvertes virtuelles du lycée

Place du numérique : 

  • Outils de gestion de projet et travail collaboratif : La Digitale.dev
  • Outils de création de la visite virtuelle : camera 360, drone, Thinglink

Cadre juridique : l’utilisation de l’outil Thinglink nécessite une inscription sur le registre des activités de traitement de l’établissement pour être conforme avec les Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD).

4. Déroulement du projet

Quelques points de vigilance à destination des enseignants : 

Les étudiants vont rencontrer le design thinking pour la première fois ; les enseignants, peu ou pas expérimentés dans ce domaine vont endosser le rôle de facilitateurs. Il faut permettre une entrée en douceur et progressive dans le cycle du design, ce qui nécessite de :

  • choisir les bons outils en fonction du profil des participants, du contexte, des possibilités (espace disponible, temps) et de l’objectif retenu,
  • privilégier des techniques de créativité simples pour favoriser les conditions nécessaires à la pensée créative,
  • proposer un environnement favorable au lâcher prise, un cadre bienveillant et sécurisant,
  • présenter explicitement la démarche convoquée, définir en amont les concepts de créativité (qu’est-ce qu’être créatif ? design thinking),
  • rassurer les participants sur leur possibilité (voir le livre blanc “test : quel créatif es-tu ?”),
  • bien cerner le défi créatif (énoncé du problème), partir d’exemples : analyse de l’existant pour circonscrire le problème (comprendre et tendre vers la définition du point de vue),
  • permettre la procédure « itérative » : de l’énoncé du problème à sa solution,
  • fournir des repères dans les phases du cycle du design,
  • aboutir à une solution qui soit conforme aux besoins des utilisateurs (désirabilité), mais aussi réaliste (faisabilité).

Le livre blanc ci-dessous recense et décrit les différentes étapes du processus :

  • Séance 1 : lancement du défi créatif
  • Séance 2 : vers l’idéation
  • Séance 3 : vers la démarche UX
  • Séance 4 : vers le prototypage [1/2]
  • Séance 5 : vers le prototypage [2/2]

Le scénario pédagogique de chacune des séances est précisé : durée, objectifs, situation dans le processus de design thinking, déroulement, outils utilisés, supports de l’activité, photographies.

Vous souhaitez convoquer l’approche par le design thinking dans un projet pédagogique ? Certains supports sont directement réutilisables et mentionnés par une étiquette. N’hésitez pas à les réinvestir ou à vous les réapproprier.

Cliquer sur l’image pour accéder au livre blanc

5. Evaluer les compétences créatives ?

Pour l’enseignant, il est complexe de nommer et évaluer les compétences créatives sollicitées chez les étudiants. Dans le cadre de ce projet, nous nous sommes inspirés des travaux de Valérie Lépine, Marie-Laurence Caron-Fasan, Sophie Portrat, Irina Egorova-Legon et Eric Giraudin : Former à la créativité à l’université pour développer les compétences en innovation, un article publié suite à la  journée d’étude “Innovation, créativité et compétences, avril 2019, Aix-en-Provence.

Lors des ateliers de créativité, les enseignants ont du mal à expliciter de manière claire les compétences créatives utilisées. Ils éprouvent également des difficultés à évaluer le travail réalisé par les étudiants et ne savent pas comment évaluer leurs ateliers de créativité (qui dans bien des cas demandent une note finale). Enfin, les étudiants eux-mêmes ne voient pas toujours l’intérêt de ces ateliers de créativité car ils n’arrivent pas à identifier les compétences qu’ils mettent en œuvre et sont souvent en attente de précisions et de clarifications. (ibid.).

La grille d’évaluation des compétences créatives de Véronique Dethier (2016) présentée dans l’article a été simplifiée par nos soins, et proposée au cours de la seconde séance (Vers l’idéation). En amont de l’atelier, chaque étudiant s’est d’abord positionné selon 13 compétences, sans justifier ses réponses. Une seconde auto-évaluation, après l’atelier et à partir de la même grille, leur a été demandée avec une argumentation à l’appui.

Suite aux échanges, les étudiants ont éprouvé des difficultés à argumenter leur niveau d’acquisition de certaines compétences, à transposer leurs apprentissages en compétences. Cette activité leur a néanmoins permis d’identifier les compétences en jeux lors de l’atelier, de repérer leurs points forts et faibles, et de faire le parallèle avec les compétences professionnelles décrites dans le référentiel en BTS Tourisme avec l’accompagnement de l’enseignant de GIT.

Cette mise en relation aide à la construction de situations professionnelles proches du réel et à la réalisation de travaux visant un développement de compétences. Chacun peut ainsi visualiser son « profil de compétences en créativité » et pourquoi pas le valoriser dans un CV et lors d’un stage professionnel. En effet, les entreprises ont besoin de connaître les compétences que les étudiants pourraient mettre en œuvre. L’étudiant doit pouvoir être en capacité d’expliciter ce qu’il est en mesure de faire et d’apporter à un employeur potentiel ou dans le cadre d’un projet à mener.

L’identification des compétences créatives, leur mobilisation puis leur valorisation reste un exercice difficile qui demande un accompagnement spécifique des étudiants par les enseignants. Cette activité a démontré combien il est nécessaire de les sensibiliser aux compétences qu’ils seront susceptibles de mobiliser, développer et acquérir dans une approche par le design thinking.

 

6. Processus créatif et apports de la recherche

D’après la publication La créativité, au cœur des apprentissages de Margarida Romero et Benjamin Lille (octobre 2017), “une solution réalisée par des écoliers et jugée créative par des enseignants pourrait ne pas être jugée créative dans un autre contexte et vécue par d’autres sujets“. La créativité est un concept complexe, par laquelle “les sujets démontrent leur capacité, individuellement ou en équipe, à développer un processus de conception d’une solution adaptée au contexte de la situation-problème et jugée nouvelle, pertinente par un groupe de référence“. La créativité est donc de nature subjective et contextuelle. Dans une situation d’apprentissage, elle est en étroite relation avec l’environnement, le ou les sujets créatifs et l’enseignant, qui propose et considère l’activité comme créative. Au delà de l’école, la créativité constitue un enjeu de développement personnel et de société au XXIe siècle.

La créativité est un processus exigeant qui demande une bonne analyse de la situation-problème pour aboutir à une solution. Elle vise la création d’une solution nouvelle, innovante, pertinente. 

Elle est souvent considérée comme une aptitude ou un trait individuel. Elle devient un processus social lorsqu’un groupe d’élèves ou étudiants est confronté à un problème complexe nécessitant de la collaboration. Dans un contexte d’apprentissage, le processus créatif peut donc avoir lieu lors d’activités individuelles ou collaboratives. Dans le deuxième cas, la cocréativité combine des facteurs liés à la résolution collaborative de problèmes et d’autres liés au processus créatif.  Pour l’enseignant, toute la difficulté réside dans comment engager les apprenants dans le processus créatif et de proposer une situation problème visant à encourager ce processus.

Être créatif est une attitude et une compétence qui se développent en s’engageant dans des projets motivants dans lesquels nous avons un réel pouvoir d’action et d’influence sur le monde qui nous entoure (ibid.).

Les deux chercheurs précisent qu’il est “difficile pour les enseignants de prioriser la créativité comme compétence à développer dans les activités pédagogiques“. Ils utilisent les termes de marge de créativité en référence à l’espace qu’offrent des éléments comme le sujet à l’étude, le contexte de la classe, le moment de l’année pour le développement de la créativité. En outre, c’est à l’enseignant de déterminer le moment opportun pour intégrer le développement de compétences créatives dans les activités de classe.

D’autre part, il est important de distinguer la marge de créativité dans la solution à créer et la marge de créativité dans le processus de création. Le contexte pédagogique peut offrir davantage de flexibilité dans la production à faire que dans le processus de réalisation, et inversement.

Si la créativité est une compétence capitale à développer chez les élèves, cela ne signifie pas qu’ils doivent toujours être créatifs. Par exemple, certains usages du numérique permettent de soutenir la créativité de l’apprenant, tandis que d’autres le placent dans une situation de consommation passive (consulter des vidéos éducatives) ou de consommation interactive (répondre à des jeux-questionnaires).

D’après le modèle de Chi et Wylie (2014), M. Romero et B. Lille ont identifié cinq types d’usage du numérique en éducation selon l’engagement de l’apprenant. La cocréation participative de connaissances constitue le niveau le plus élevé dans la compréhension ou la résolution de problèmes partagée par la classe. Le collectif est perçue comme une communauté d’apprentissage.

Enfin, la créativité n’est pas uniquement associée aux enseignements artistiques ou littéraires, elle peut être développée dans des disciplines ou des sujets non associés à la créativité.

En considérant l’histoire comme une discipline interprétative où les sources et les témoignages servent de terreau à l’établissement des faits et au développement d’une compréhension profonde, le processus d’enquête historique et le processus créatif possèdent alors plusieurs points en commun (ibid.).

Nous pouvons compléter cette réflexion avec le modèle multiniveaux de la pédagogie créative (Romero, 2017). Il présente les différents éléments et acteurs impliqués dans le développement des processus d’enseignement et d’apprentissage par la créativité.

Une activité est dite technocréative si elle repose sur l’usage créatif du numérique pour résoudre des problèmes (Romero et Lille, 2017). Lorsque l’enseignant convoque l’approche par le design thinking, il s’appuie sur les ressorts  de la démarche de la recherche scientifique avec :

  • identification d’un problème, réflexion théorique de départ, resserrement du questionnement,
  • identification des hypothèses et démarche itérative essai/erreur permettant de valider ou d’invalider ces dernières.

Nous retrouvons ici les éléments fondamentaux du cycle du design thinking : espace du problème / espace de la solution.

Ce modèle aide l’enseignant à concevoir une situation pédagogique créative en introduisant la notion d’expérience vécue par les élèves, également à considérer les marges de créativité dans leur ensemble. Il convient de définir :

  1. La situation d’apprentissage (le problème de départ ou le défi à relever) ;
  2. L’activité proposée dans laquelle on identifiera le processus ;
  3. Le climat d’apprentissage permettant d’appuyer le processus créatif ;
  4. Les environnements physique et numérique qui peuvent servir de support.

La démarche de design thinking et le processus créatif de manière générale, reposent sur les interactions des différents acteurs.

  1. Les élèves (ou apprenants créatifs) s’engagent dans une résolution du problème (défi),  seuls ou en équipe, pour trouver une solution originale, pertinente et efficace ;
  2. L’enseignant “créatif” veille au maintient du processus créatif, au pouvoir d’agir des apprenants afin qu’ils développent des compétences personnelles.

7. Citoyenneté numérique

Les différentes étapes du projet ont été l’occasion de réfléchir :

  • à l’intégration des outils numériques au service du processus créatif,
  • aux usages responsables du numérique.

Le cahier des charges imposait de veiller à l’utilisation d’outils respectueux des utilisateurs, de leurs données personnelles, conformes aux RGPD (il n’existe pas d’outils de visites virtuelles respectant ce cadre réglementaire). Une autre compétence attendue pour les futurs professionnels. Nous avons proposé une campagne de positionnement (parcours de rentrée post-bac) via Pix Orga. D’autres parcours ont ponctué le projet pour permettre le développement de compétences numériques :

  • Mener une recherche et une veille d’information
  • Gérer des données et traiter des données
  • Interagir. Partager et publier
  • S’insérer dans le monde numérique
  • Développer des documents textuels et multimedia
  • Adapter les documents à leur finalité
  • Sécuriser l’environnement numérique
  • Protéger les données personnelles et la vie privée

L’objectif est d’accompagner les étudiants à la certification PIX en deuxième année de BTS, de valoriser leur CV et faciliter leur embauche ou la poursuite d’étude.

8. Bilan et perspectives

  • Le codesign actif va bien va au-delà d’un apprentissage par le faire dans une approche basée sur le projet” (Curry, 2014; Schön, 1985).
  • L’approche par le design thinking nécessite de la pratique afin de tirer le meilleur de ce concept et libérer la créativité des étudiants. Ce mode de conception suppose des compétences et un mode de penser dont ne disposent pas tous les étudiants au départ.
  • Cette méthode induit un changement du rôle de l’enseignant qui devient un animateur, un facilitateur, un médiateur auprès des étudiants. Il est le créateur et le garant d’une synergie basée sur la communication multidirectionnelle et l’implication active de chacun. Il est indispensable de créer un cadre bienveillant et sécurisant, un environnement supportant les interactions sociales, à savoir la communication verbale, les moyens d’expression graphiques et physiques. L’enjeu est de réussir à faire prendre conscience de la nécessité d’innover, d’identifier clairement le problème, de réfléchir aux solutions possibles, de tester différents prototypes pour aboutir au résultat final.
  • Tout ceci ne s’improvise pas et suppose de la part de l’enseignant de se former. Les lectures et le suivi d’un cours en ligne (Animer un atelier de créativité, Openclassroom) ont été indispensables pour apprivoiser cette approche du design thinking. Une séance créative en mode brainstorming exige autant, voire plus de préparation qu’une réunion classique.
  • Nous avons pu identifier quelques freins ou limites. Les étudiants ont ressenti de réelles difficultés à s’investir dans le collectif de la classe. Certains ateliers ont été les témoins de longs silences, malgré un environnement propice à la communication avec l’appui d’outils diversifiés, autant physiques que numériques, en support de la communication verbale.  Nous pourrions expliquer ces blocages par la peur de penser à haute voix. Ils craignent le refus, l’opinion de l’autre, la critique, le renouveau, la subjectivité, l’improvisation, le lâcher-prise, l’exigence “demandée” de penser ensemble, par le manque d’habitude à travailler en équipe. Les étudiants ne sont pas habitués à travailler dans une démarche de design thinking. Il peut être difficile pour eux de faire preuve de spontanéité. Un clivage apparait également entre faire du design (développement de projet) et comprendre le design (comprendre les mécanismes du processus de conception).
  • Créer un environnement favorable ne suffit pas toujours pour faciliter la communication au sein de groupe et encourager la créativité. La génération des idées s’effectue ensemble à travers un échange spontané où les idées se bâtissent les unes sur les autres, se complètent, se négocient, pour aboutir à un consensus.
  • Pour apprécier l’impact de cette approche sur la démarche de projet, sur le déroulement de l’atelier, les apprentissages, la dynamique de groupe, il aurait été intéressant, en complémentarité de la grille, d’interviewer les étudiants pour recueillir leurs perceptions des expériences vécues au cours du processus. Dans un contexte d’apprentissage, le codesign devient une collaboration étroite entre l’enseignant et ses étudiants. Comment cette approche influence-t-elle alors la pédagogie ? Comment change-t-elle la situation d’apprentissage ? À la différence d’un atelier traditionnel, l’enseignant n’est plus une figure d’autorité. Il participe lui aussi à une situation de design avec l’étudiant dans un processus collaboratif simultané. Dans cette perspective, l’apprentissage de la conception est un processus social.
  • Cette nouvelle expérience, pour les étudiants comme les enseignants, a démontré que le codesign constituait une approche pédagogique comparable à la réalité des pratiques professionnelles, en situant l’apprenant au premier plan. Si les ateliers ont remodelé leur façon de faire et de penser, ils restent tributaires de la capacité de l’enseignant à les animer et d’un certain degré d’expertise dans la méthode employée.
  • Les étudiants ont été plutôt réceptifs et enthousiastes à l’idée de tester d’autres méthodes pédagogiques. Nous avons pu constater un premier pas vers une liberté d’expression de la part des étudiants au cours de la deuxième séance. Les premières idées ont émergé, peut-être pas à notre espérance, mais un point de départ pour aborder les projets collectifs en deuxième année. Nous envisageons de réinvestir la méthode sous la forme d’un hackathon pour éviter cette scission dans le cycle du design, pouvant expliquer certains blocages et soutenir l’engagement de étudiants.

9. Production finale

Encore un peu de patience… Les étudiants en BTS Tourisme sont actuellement en stage. La visite virtuelle sera publiée prochainement.

 

10. Bibliographie

  • Gamba Tiphaine, « D’où vient la « pensée design » ? », I2D – Information, données & documents, 2017/1 (Volume 54), p. 30-32. DOI : 10.3917/i2d.171.0030. URL : https://www.cairn.info/revue-i2d-information-donnees-et-documents-2017-1-page-30.htm
  • Tim Brown. L’Esprit design. Comment le design thinking transforme l’entreprise et inspire l’innovation, 2ème édition, Nouvelle édition enrichie et actualisée. Pearson, 2019
  • Michael Lewrick, Patrick Link, larry Leifer. Le kit du design thinking. Comment utiliser les méthodes d’innovation les plus connues et les plus efficaces. Pearson, 2021
  • Rey Olivier, Feyfant Annie (2012). « Vers une éducation plus innovante et créative ». Dossier d’actualité Veille et Analyses, n°70, janvier. En ligne : http://ife.ens lyon.fr/vst/DA/detailsDossier.php?parent=accueil&dossier=70&lang=fr
  • La lettre ÉduNum thématique n°15 (novembre 2021) s’intéresse à la notion de créativité en lien avec le numérique éducatif à travers les disciplines et enseignements, en croisant les regards didactiques et pédagogiques.
  • Heiser, L., Romero, M., De Smet, C. et Faller, C. (2020). Conception d’activités technocréatives pour le développement d’une pédagogie créative. Formation et profession, 28(2), 51-59. http://dx.doi.org/10.18162/fp.2020.547
  • Le manuel Le Design Thinking pour les enseignants conçu par l’agence IDEO et la Riverdale Country School, 2012.

Le design thinking au service de la créativité numérique
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